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Quel type d’éducation religieuse?

Samba Diallo était vêtu de haillons. De sa voix sévère et innocente, il hurlait la ‘’Parole’’ dans les brumes du matin: « Songez à votre mort. Eveillez-vous… L’ange de la mort déjà fend la terre vers vous ». Et encore : « La mort est violence qui triomphe, négation qui s’impose. Que la mort dès à présent soit familière à vos esprits » (C. H. Kane, L’aventure ambigüe, 1961, pp. 25, 26). Il n’était encore qu’un gamin.

En l’entendant, la Grande Royale fut ahurie. Le soir tombant, elle se rendit chez Tierno, le maître qui avait en charge l’éducation religieuse du jeune garçon. « Maître, je viens vous voir au sujet de Samba Diallo. Ce matin, j’ai entendu les litanies qu’il improvisait. Je sais bien que la pensée de la mort tient le croyant éveillé (…) Mais je crois que le temps est venu d’apprendre à nos fils à vivre » (pp. 36, 38).  Le maître, de manière ferme : « Non, madame. Vous voyez que je blesse la vie dans votre jeune cousin et vous vous dressez en face en moi (…). Je vous prie de ne point me tenter, et de laisser à ma main sa fermeté ».Samba Diallo était vêtu de haillons. De sa voix sévère et innocente, il hurlait la ‘’Parole’’ dans les brumes du matin

Dialogue difficile ! Les deux interlocuteurs ont des visions différentes de l’éducation religieuse :

–       Pour la Grande Royale, l’enseignement spirituel doit avoir comme finalité l’initiation à la vie.

  • En revanche, pour Tierno, il s’agit de raviver dans les âmes la conscience des fins dernières. La vie ici bas n’est, selon lui, que peine et misère. Ce qui compte, par conséquent, c’est de vivre dans la « crainte de Dieu », obéir à la « Loi divine » pour espérer échapper à la damnation éternelle.

Kane questionne de manière critique cette vision de Tierno. Elle engendre une cassure entre l’être et la vie. Samba Diallo prit progressivement conscience de cette dualité tragique qui l’habite: « Mon père ne vit pas, il prie… Tiens ! Pourquoi ai-je pensé cela ? Pourquoi ai-je pensé la prière et la vie en termes d’opposition ? Il prie, il ne vit pas…Curieux. Idée bizarre. Où donc ai-je pu la prendre ? » (pp. 105-106).

Quel désastre lorsque l’éducation religieuse n’aide pas le croyant à retrouver son propre équilibre et son harmonie intérieure !

By: Mahougnon Sinsin

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